***
LA FLEUR
C’est mon heure.Maintenant, ce sera toujours
L’étendue de mon heure.*
Mais oui !
Je vais m’ouvrir.Ce n’est pas la peine, vous,
De tant pousser.Je connais mon rôle.
J’y suis préparée.*
Des mois,
Que j’y travaille.Permettez quand même
Qu’au dernier instantÇa ne me soit pas rien
De m’ouvrir sur l’espace,La lumière.
*
Ce n’était pas si mal
D’être larve de fleur,De me tricoter ces couleurs
Avec du noirEn étant presque sûre
De ne pas me leurrer
Sur la moindre nuance.*
C’est très supportable, ce noir,
Quand on sait qu’on le trompe
Avec lui-même,Que tout à l’heure
Il n’aura pas à se reconnaîtreDans ce qu’il a voulu
Et fait.Patiente un peu,
Immensité du noir.Tu vas pouvoir
Admirer ton travail.*
C’est mon heure.
C’est maintenant
Que le noir me renie,Me laissant seule
Dans le combat
De mes couleursAvec ce qu’il y a
De plus vorace.*
Jusqu’à présent
J’étais l’espoir
D’être moi-même enfin.Maintenant vient l’espoir
De demeurer longtemps
Au bord de l’avenir,Avant de pénétrer
Dans le flou de cette heureQui pour moi
Sera mon toujours.*
Allons briller.
C’est l’heure.
Allons briller
Jusqu’à la chute.
Guillevic -Trouées