Famille

Ma mère vient de faire un avc, le deuxième en deux ans. Celui-ci causé par la légèreté du personnel médical suite à une fibroscopie malheureuse. Le premier, c’était un jour avant son anniversaire, ses 80 ans. On devait faire une grande fête, un frère était rentré du Japon, presque tout le monde était là. Fête annulée, hôpital. Mon ex l’a vu pour la première fois ainsi, couchée, affaiblie dans son lit de malade. Elle qui était si forte, indestructible. Elle avait laissé couler quelques larmes en me voyant, accompagné d’une si belle femme. Oh juste trois ou quatre, on montre peu chez moi. Et s’était excusée de gâcher la fête…

Je viens de manger avec elle, elle va bien, a du mal à parler, mais a conservé toute sa tête, et sa mémoire. Nous avons discuté de ma supposée surdouance, de mon enfance, cela ne l’a pas étonnée. Elle m’a reparlé de mes premières années scolaires, comment j’aidais l’instit au CP pour apprendre à lire aux autres. Pourquoi je n’ai pas sauté de classe suite à un déménagement. Et de ce test en 6ème ou 5ème ou j’avais été pisté. Elle s’en souvient assez bien, mais n’en sait pas plus que moi. Nous n’avons jamais eu de trace écrite, rien. Juste un chiffre, j’aurais été testé à largement plus que 140. Ce chiffre ne m’a même pas étonné, je crois que je le savais, mais que je l’avais instantanément refoulé. Je n’en voulais pas de ce truc. Juste être un élève comme les autres. Par contre, elle ne savait pas pour les difficultés, les dégâts collatéraux. Pour l’école oui, mais pour le reste…

Puis on a parlé de la famille, d’où pouvait venir ce gène du « trop intelligent ». Je crois bien qu’une grande partie de la famille est infectée 🙂 Elle m’a cité ses grand parents maternels suisses, le père artiste peintre/graveur, la mère prof de piano. Puis mon père, toujours premier de classe tant qu’il y a été, puis son premier boulot dans une librairie toulousaine, et comment il a été pris d’affection par sa patronne (Mme Privat, pour ceux qui connaissent), un peu comme son fils. Puis le destin, engagé dans la police sur les conseils d’un voisin pendant la seconde guerre mondiale pour échapper au STO. Des bouquins à la matraque… Un frère qui vit à Tokyo depuis plus de 20 ans, prof de français, et qui a monté sa troupe de théâtre, après avoir été musicien, danseur, mime, comédien en France. Un autre qui a tous les symptômes du scanneur fou, grand adolescent de presque 60 ans. Et chez tous, une grande instabilité émotionnelle.

J’essaye de rester froid, détaché, en écrivant ses mots, mais qu’il fut difficile de garder mon calme pendant cette discussion. Je plaçais mes mots avec précision, contrôlait ma respiration du mieux possible, pour que ne surgisse pas le trop plein d’émotion.

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